Didier Kala, dimanche 20 juin 2010 - 09:37
Dominique de Villepin a présenté hier à Paris les bases de son nouveau mouvement République Solidaire. Réunis à la Halle Freyssinet, 3000 fidèles ont ovationné l’ancien Premier ministre tout au long d’un flamboyant discours qui l’a incontestablement mis en lice pour les élections présidentielles de 2012. Ou pas. Brave Patrie était sur place.
L’ochlophobe pouvait entrer en confiance dans la Halle Freyssinet, une ancienne structure décrépite du XIIIe arrondissement de Paris, l’un de ces ponts architecturaux lancés entre un XXe Siècle industrieux et un XXIe dédié à la force des idées.
L’immense halle dépouillée offrait en effet les vastes espaces nécessaires à la respiration, en même temps que la possibilité de se mêler à la foule diverse pour prendre le pouls d’une envie, d’un désir de France, auxquels les salles de bals de sous-préfecture n’avaient pu laisser place lors du Débat sur l’Identité Nationale sans dégager au bout d’un petit quart d’heure une tenace odeur de chacal mouillé.
La sévère pénurie de shit de table qui frappe la rédaction depuis quelques semaines empêchait toutefois de pleinement apprécier les jeux de la capricieuse lumière crue de juin au travers de la dentelle de verrières qui donnent à l’endroit une étonnante légèreté. De même que les sandwiches poulet-crudités vendus à la buvette, assez difficilement ingérables pour qui ne souffrait pas d’une fringale critique.
Un service d’ordre souriant et enthousiaste - jamais personne ne s’était entendu souhaiter un « bonjour » articulé par quatre vigiles successifs avant ce jour - guidait le nouvel arrivant vers des stands pris d’assaut, sur lesquels il était possible d’acheter des t-shirts, maquettés sous Paint ou Powerpoint mais qui établissaient sans risque d’incompréhension le cadre de la journée : le slogan « Tous solidaires », barré d’un grand « V ».
Pas pour Vendetta, apparemment. Cette période de la vie de Dominique de Villepin est révolue, et c’est en effet dans une ambiance très bon enfant que se mélangeaient des gens de tout âge, de toutes origines sociales et ethniques.
Et pas seulement au service d’ordre.
Le désagréable vent du nord qui baignait Paris conférait de plus à l’achat d’un t-shirt un petit côté follement idéaliste qui allait donner le ton.
Le visiteur pouvait lire sur les écrans suspendus qui l’accueillaient des SMS de soutien à l’homme qui n’est encore candidat à rien : « Votre force, votre courage, votre conviction, vont redonner courage aux Français », « Tous mes respects pour vos services à la France ! », « Merci de vous battre pour la Paix »...
Première surprise : tous ces messages ne sont pas signés Chris. Les prénoms affichés étaient furieusement divers, chacun pouvait s’y retrouver : Jean Alfred, Yanah, Martine, Mohamed... L’image donnée par la foule est confirmée : M. de Villepin rassemble.
Jusque très loin, d’ailleurs, puisqu’un des messages les plus émouvants - et piquants pour l’actuel président de la République - tenait en deux petites phrases : « Un homme de classe !!! Qui est français et qui a de l’allure... lui... ».
Classe et allure, incontestablement.
Parce que tout le monde ne se souvenait plus très bien de qui était M. de Villepin, qui nous a quittés il y a déjà trois ans, il était nécessaire de rappeler ses idéaux. Un impeccable casting apéritif s’en est chargé, de Français anonymes et actifs tant du point du vue associatif que professionnel.
Des mots-clés habilement placés dans leurs interventions ont permis d’ancrer les thèmes du jour, immédiatement suivis d’applaudissements d’intensité croissante qui serviraient de mètre-étalon - une image remarquablement appropriée à l’ancien premier Ministre - pour la suite de l’après-midi : Martin Luther King, le bon Dieu, l’héritage gaulliste, l’apartheid, le général de Gaulle (applaudissements assourdissants) et la justice sociale, agriculteurs (le toit tremble. Tous les Chiraquiens sont là), etc.
La maîtresse de cérémonie, une inconnue qui dit ne pas avoir prévu être là (nous non plus) ni avoir écrit de discours (en effet), parle ensuite d’un docteur en physique des liquides présent dans l’assistance.
S’agirait-il de la première star de la journée ? Jean-Louis Borloo allait-il rompre l’union sacrée autour de Nicolas Sarkozy pour afficher son soutien à celui qui pourrait être son pire ennemi ?
Non. Le docteur en question était titulaire d’un vrai doctorat, et ne montera jamais sur scène. Le public n’a pas le temps de se lamenter que déjà était diffusé un montage vidéo, lui aussi très certainement réalisé sous Paint ou Powerpoint, de témoignages de soutien à M. de Villepin.
Le côté délicieusement post-punk de ces micro-trottoirs enregistrés sur le bas-côté d’une nationale francilienne fit encore monter la température de quelques degrés : à travers le brouhaha inaudible, seul le mot « France » surnageait. Un régal à l’oreille du Brave Patriote ; l’affichage sans équivoque d’une ambition présidentielle.
La salle était chaude pour le clou du spectacle, mais le machiavélique metteur en scène de l’événement choisit de faire croître encore l’intensité du moment en diffusant sur l’écran géant un remix du plus grand succès de M. de Villepin à ce jour : le discours de l’ONU en 2003.
Des flaques apparurent sous les chaises de l’assistance exaltée.
Et enfin put arriver l’Homme. Le Sauveur. Celui que tous attendaient. Sur un hymne gai et universel, un hymne d’avenir, un message de foi et d’espoir : Relax, par Frankie Goes To Hollywood.
Le cortège tenta d’abord d’accéder au podium par l’allée centrale, mais sans doute à cause de la foule en délire ou de la flaque de bonheur qui couvrait maintenant toute la dalle de la halle, le chemin se révéla vite impraticable.
Fidèle encore à son mentor, M. de Villepin improvisa alors un mouvement tournant côté jardin, ce qui fit s’écrier @thibaultdm [1], aux côtés de qui nous livetweetions, « Il arrive par derrière ! ».
C’était maintenant certain : la France allait prendre très très cher dans le bassin.
Or non.
Malgré ses grands talents d’orateur, malgré ses références aux grandes heures de la citoyenneté française (1789, énormes applaudissements, liberté de la presse, applaudissements encore plus assourdissants, affaire Dreyfus et protection des juifs, bref moment de doute de l’assistance et applaudissements timides, coupe du monde de 1998, standing ovation, etc.), M. de Villepin ne put qu’en de très rares occasions - notamment la nécessité d’ouvrir la mémoire française à l’immigration - s’extraire d’un amoncellement de platitudes.
Nous savions certes que la marée noire c’était mal. Nous savions aussi que gronde la colère dans les quartiers, à qui il faut « donner le pouvoir de changer », chose qu’entre parenthèses les quartiers attendent depuis certaines promesses de fin 2005, début 2006.
Et c’est là que le bât blesse : oui, M. de Villepin n’a jamais été élu et à ce titre peut se présenter comme un homme neuf pour un monde qui prend un nouveau tournant. Il ne faudrait néanmoins pas surestimer la formidable capacité de renouvellement neuronal des Français. Ceux-ci peuvent légitimement tiquer quand ils entendent l’ancien Premier ministre dénoncer « l’Europe libérale et lointaine » contre laquelle ils se sont exprimés, ces cons, lors du référendum de mai 2005.
De la même façon, ce n’est pas en formulant des propositions intenables que l’on devient président de la République (interdire aux grands groupes industriels ayant partie prenante dans les chantiers publics de posséder des organes de presse ou de télévision, par exemple. Vous voulez faire campagne sur Fréquence Paris Plurielle ?), ou en déclarant « Va te faire enculer, sale fils de pute » au président chinois qu’on le reste.
L’irréalisme un peu foutraque de M. de Villepin le condamne à jouer les seconds rôles à droite. Il pourrait certes emprunter quelques voix à M. Sarkozy au premier tour avec une hypothétique candidature en 2012, mais il serait bien vite forcé de les rendre.
Malgré le bel enthousiasme des partisans du challenger, le président de la République peut dormir tranquille. Le panache c’est très joli, mais ça n’a jamais mené très loin en politique.
Nous ajouterons qu’au moins, sur la péniche de Mme Pécresse, les bières étaient gratuites, même si ça finissait en fight club.
Vous pouvez retrouver notre livetweet en cliquant ici. Vous pouvez aussi lire ceux de @mancioday et de @thibaultdm, que nous avons été honorés de rencontrer à l’occasion.
Ceci étant dit, Thibault, entraînez-vous si vous voulez un jour rechanter la Marseillaise à portée d’oreille d’un Brave Patriote. Nous avons du métier, et là c’était tout simplement insupportable.
[1] Benjamin, il faut qu’on parle : @thibaultdm livetweete sur un vieux téléphone pourri. Nous savons bien que nous sommes en période de rigouille, mais tu pourrais au moins fournir des iPhones à tes JUMP, parce que là ils n’ont l’air de rien.
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