Suzy s’endormira en sécurité ce soir. Nue sous un simple drap de soie, ses longs doigts fuselés remonteront le galbe parfait de sa cuisse blanche, doucement, doucement vers le temple moite de son intimité glabre. Dans une semi-léthargie frémissante, les lèvres entr’ouvertes, Suzy pourra se laisser aller à des rêveries interdites et momentanément oublier le souffle rauque du gros loup qui a tenu la France en émoi ces dernières semaines.
A 72 heures du second tour des élections régionales, la nouvelle est en effet tombée : les terroristes d’AZF lèvent la menace qui pesait sur notre réseau ferré.

Dans une longue lettre tachée de larmes envoyée à l’Elysée et au ministère de l’Intérieur, Gros Loup a reconnu que son amour pour la douce Suzy n’avait que peu de chances d’être payé de retour dans les circonstances actuelles.
En termes confus, l’amoureux éconduit exprime pêle-mêle ses regrets et ses insuffisances, mais aussi sa détermination à conquérir un jour le cœur de sa belle.
"Tu ne me prends pas au sérieux" est-il écrit. "Pourtant, j’ai tout essayé - maladroitement parfois [...] je te prie de m’excuser pour dimanche. Je voulais te rendre service, mais je t’ai aznarisée sans le vouloir. Je suis un misérable. [...] J’ai peur de te blesser davantage dimanche prochain, et je vais dès à présent te laisser tranquille."
Mais, incohérence ou obsession de désespéré, AZF annonce plus loin son intention de revenir à la charge : "je vais remédier à mes faiblesses technologiques, logistiques et autres. Dans un peu plus de deux ans, mon amour, je saurai te faire prendre le formidable ascenseur jusqu’au septième ciel, jusqu’à l’île des bienheureux, nudge nudge wink wink."

"Dans un peu plus de deux ans", Suzy admet y penser le matin en s’épilant devant le miroir, mais elle conteste avec véhémence le reste des faits évoqués : "Ce blaireau n’a aznarisé personne, tout se passe comme prévu. Des lettres d’amour de désaxés, j’en reçois tous les jours. De Paris, de Corrèze, de Meaux... ils sont tous dingues de moi. Y a même des malades qui font gicler le yaourt. Contre ces gens-là, je n’ai qu’une seule réponse : l’action. Gros Loup, je te lui ai pété la lacrymo dans la gueule, c’est normal qu’il chiale maintenant."
Il est vrai que la gestion de la crise AZF par le ministère de l’Intérieur a été exemplaire : huit avions AWACS, dont sept très furtifs, ainsi que 10000 cheminots accompagnés de leurs verrats chercheurs de truffes ont permis d’assurer la sécurité des usagers du rail. Pour autant, Suzy pense-t-elle que les maître-chanteurs pourront toujours être tenus en respect ?
"Je ne le pense malheureusement pas", dit elle en se levant et en se présentant de trois-quarts à son miroir. "Il suffit d’un seul instant d’inattention de notre part, et un carnage peut survenir. Malgré mes efforts, les Français doivent se tenir sur leurs gardes, voire même avoir un peu peur. En particulier dans deux, trois ans, si Gros Loup tient ses promesses." Elle caresse sa poitrine avec une moue espiègle : "Tu crois que les électeurs m’aimeront toujours dans deux trois ans ?"

Pour Walter Sobchak, notre consultant en terrorisme et guerres d’Extrême-Orient, la vérité se trouve entre ces deux versions et est beaucoup plus subtile : "C’est des tapettes."
"AZF s’est grillé tout seul, à la Dean : grande bouche et puis pfft, au moment de montrer ce qu’on a dans les urnes, plus rien - ils font encore moins que Bayrou, c’est dire.
Qu’ils crashent avant la fin, c’est normal. L’UMP s’est rendue compte qu’elle n’avait rien à faire avec eux, et qu’il fallait plutôt discuter avec les Serviteurs d’Allah le Puissant et le Sage si elle voulait récupérer les brebis égarées dans la porcherie sans trop trop conchier l’Esprit de Mai."
Une candidature AZF serait-elle envisageable en 2007 ? Walter Sobchak ne peut pas se prononcer avec certitude : "Ils se sont couverts de ridicule, et cela les Français ne le pardonnent en général pas. Regardez Giscard d’Estaing : il n’a jamais été réélu après son petit numéro de la chaise, sauf en Auvergne où la télé est arrivée en 84, et à l’Académie, mais eux ont le cerveau en sauce blanche.
En toute logique, nous ne devrions plus jamais entendre parler d’AZF. C’est dans leur intérêt de se faire oublier, ils sont trop cons. Mais justement parce qu’ils sont vraiment cons on ne peut totalement exclure une réapparition avant le prochain scrutin où se présentera Suzy."

Qu’il s’agisse d’un retrait volontaire d’AZF ou de l’effet de la formidable action des forces anti-terroristes (et des contrôleurs de la SNCF), le résultat n’en est pas moins là : la menace a disparu grâce à la détermination de Suzy Nicolas Sarkozy. Ne l’oubliez pas en allant voter dimanche !