Ce gouvernement n’entrera dans sa seconde année que le 6 mai prochain, date anniversaire de la passation des pouvoirs entre le trotskiste Lionel Jospin et le visionnaire Jean-Pierre Raffarin. Mais, comme dirait ce dernier, "la valeur n’attend pas l’ombre des années sur ton visage".
A tout juste huit mois, le gouvernement a déjà opéré une stupéfiante métamorphose qui augure à peine celle que la France, engoncée dans la chrysalide de fer des années de dictature socialiste, s’apprête à vivre, pour devenir ce grand papillon tricolore prêt à polliniser de ses valeurs fondamentales, la Liberté, l’Egalité et la Décentralisation, mamelles d’une action résolue et équitable, un monde incertain et dangereux.

Comment Jean-Pierre Raffarin, débonnaire homme de terrain, a-t-il pu se transformer en l’humaniste, l’homme actif, le chantre de l’humanisme d’action que nous connaissons aujourd’hui ?
En fait, et ceux qui ont le bonheur de le côtoyer vous le diront, il n’a pas changé. Cagouille Sagace, comme l’appellent encore ses anciens camarades boy-scouts, est toujours ce bon vivant, grand amateur de boudin, que les plus attentifs des commentateurs politiques promettaient à un brillant avenir sous Valéry Giscard d’Estaing.
Non, le Pompidou poitevin au petit quelque chose de napoléonien n’a pas changé : ce sont les Bravepatriotes qui le regardent différemment. Et cela change tout !

Cet An II, cette promesse de victoire, le flambeau triomphant de la République, c’est avant tout dans le regard des observateurs qu’il est né. C’est sous la plume de tel journaliste de presse, par la voix de tel journaliste de radio, à travers les magnifiques images de tel journaliste de télévision, que Jean-Pierre Raffarin a pris dans le cœur des Français sa véritable dimension.
Car la méthode n’a pas changé : hier du pragmatisme, aujourd’hui un actif humanisme d’action humaniste. En définitive toujours la même recette gagnante, appliquée avec enthousiasme par chacune des femmes, chacun des hommes, qui composent cette équipe gouvernementale. Une recette simple, qui plaît aux Français et porte ses fruits : un problème, une solution.

Comme l’humble citoyen de la France d’en-bas mène sa vie quotidienne, Jean-Pierre Raffarin mène le majestueux vaisseau de la nation, et c’est cela qui rend le second si proche du premier. Comme on descend une poubelle pleine, le gouvernement prend à bras-le-corps les problèmes hérités des années de plomb. Violences à l’école ? Les surveillants seront recrutés parmi les militaires retraités. Des voyous des mers polluent nos côtes vierges d’hydrocarbures ? Les plus grandes sanctions leur seront infligées. Les dépenses de santé sont trop élevées chez les Français ? Nous réduirons la couverture maladie universelle.
Ce système a fait ses preuves : dans les quartiers défavorisés, à la dernière Saint-Sylvestre, moitié moins de voitures de couleur verte ont brûlé. Des saisies record de résine de cannabis (pour un mardi) ont été effectuées l’été dernier.
La population souvent modeste sent bien ce vent d’espoir, et regagne du terrain dans les zones de non-droit. Portés par ce magnifique souffle, et par les efforts pédagogiques du ministre-philosophe helléniste Luc Ferry, ils se sentent pousser des ailes, et célèbrent à coups d’inscriptions furtives la victoire des forces de l’ordre sur les murs de leurs cités reconquises : "Nikê la police".

Mais l’action du gouvernement est aussi tournée vers l’avenir : à travers ce plan qui incite les entreprises à embaucher des jeunes sans qualification. A travers l’encouragement des fonds de retraite complémentaires. A travers enfin cet exemple admirable de confiance accordée à un homme public novice : le 1^er janvier de cette année, c’est Léon Bertrand, secrétaire d’Etat au tourisme, qui a eu l’immense honneur de porter les couleurs de la France lors de l’investiture de Luiz Inacio Lula da Silva, le nouveau président du Brésil, plus grande nation d’Amérique Latine, et pays frontalier de la France par la Guyane.
Parions que tous deux sauront se souvenir de ce magnifique exemple, et que les relations etre la France et le Brésil se trouveront renforcées d’une intime mais virile complicité.

L’An II de Jean-Pierre Raffarin, vieux seulement de quelques jours, porte en ferment les fruits sucrés que nous avons seulement devinés jusqu’ici : un pragmatisme fait pour durer mille ans. Et la France aime ça, il n’est que de lire les journaux.