(La dépêche est tombée ce matin, lapidaire, en provenance du Ministère de l’Intérieur : "Nous demandons instamment aux rédactions de ne PAS communiquer sur les menaces du groupe ERIKA tant que l’enquête ne sera pas close. Pour d’évidentes raisons de sécurité publique, il serait en effet malvenu que la population prenne connaissance de cette affaire avant les élections à caractère purement local de la fin du mois."
Après un grave débat interne, la rédaction a cependant estimé que son devoir résidait dans l’information du public.)

Un groupe terroriste, ERIKA, menace de faire sauter tous les vécés des stations Total du réseau autoroutier français si le gouvernement ne leur verse pas 1 milliard de roubles et 15 euros, avons-nous appris dans le dossier de presse joint à la note du ministère.
Bien que ce groupe soit inconnu des services de renseignement, le Ministère de l’Intérieur affirme que la menace "est prise très au sérieux". En effet, le dernier message d’ERIKA a guidé les policiers jusqu’à la chambre de Claude Nougaro, où ils ont retrouvé une bombe lactée que lancent les gamins dans les mains du chanteur décédé.
"Ces individus sont des spécialistes" a affirmé Nicolas Sarkozy avec une moue de dégoût. “Soyez bien assurés que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour qu’ils soient mis hors d’état de nuire avant le vague petit scrutin de la fin du mois."

Les motivations d’ERIKA, dont une partie des messages est imprimée sur du papier à en-tête du Parti Socialiste, semblent difficiles à cerner. Dans un salmigondis incohérent, le groupe dénonce tour à tour la mainmise d’un parti sur toutes les branches de l’Etat, la lutte des classes engagée par le gouvernement Raffarin, le démantèlement des acquis sociaux, et appelle à la dictature du prolétariat tout en menaçant de faire des cratères de 30 mètres de profondeur "comme à l’usine AZF".
Selon les autorités, ces références "ésotériques" seraient une diversion. Une enquête a toutefois été ouverte sur l’existence d’un dénommé Lionel Staline, qui semblerait être le leader des maîtres-chanteurs.

Les réactions du gouvernement, qui assure maîtriser la situation, ne se sont pas fait attendre. Ainsi François Fillon : "Ca sera décompté sur notre temps de parole pour la votation facultative du 21 ? OK. Je l’affirme haut et fort : je n’ai pas peur d’aller pisser dans les stations Total ! Je suis même prêt à le faire sans les mains s’il le faut ! Par dessus mon épaule ! Les yeux fermés ! Au milieu des toilettes des femmes !"
Claude Guéant, le directeur des cabinets du Ministre de l’Intérieur, se montre toutefois plus circonspect : "En publiant ces informations, vous courez le risque d’inciter ERIKA à passer à l’acte, et les conséquences sur la population pourraient être désastreuses. Je répète : désastreuses. Ca va être un carnage, plus personne ne pourra se considérer en sécurité. Je répète : insécurité. Vous instillez la peur. La peur. Vous avez peur. Je trouve cela irresponsable alors que certains Français peuvent être tentés de voter s’ils n’ont rien d’autre à faire à la fin du mois. Je répète : les Français n’ont rien à faire à la fin du mois."

Quoiqu’il en soit, la direction de Total a assuré que la sécurité des usagers de ses toilettes était une priorité, et que plus de 10000 volontaires birmans s’étaient déjà spontanément proposés pour inspecter chaque recoin des gogues du groupe pétrolier. Les résultats de cette inspection seront commentés au jour le jour par tous les grands media nationaux, et son résultat devrait être connu le 29 mars vers midi. Prions pour qu’alors le danger soit passé.