Didier Kala, vendredi 1er août 2008 - 07:47
« Quand deux gros cons s’étripent au sujet d’un troisième, c’est dingue le monde qui sort du placard pour commenter » , disait Metternich. Et s’il fut question de juifs (par hasard), d’antisémites (par réflexe), d’Arabes (par ricochet) et de gros cons (par trackback), aucun pédé n’a surgi de ce meuble quintessentiellement homosexuel. Or pédé (ou enculé, sa variante grivoise) est bien l’une des invectives préférées des Français. Se jugeant oublié, le lobby idoine a choisi de hausser le ton, et souhaite lui aussi plonger dans le verre d’eau qui abrite la tempête. A poil, bien sûr, comme le veulent les coutumes du peuple pédé.
Est-ce dû à la paucité des débats intellectuels qu’il reste à régler à nos éditorialistes, à celle non moins abyssale des sujets qu’il reste à régler à nos journalistes, ou au bonheur absolument parfait dans lequel vivent les Bravepatriotes depuis la sortie du troisième album de Carla Bruni ?
Toujours est-il que le feuilleton de l’été peine à décoller du monde des colonnes de périodiques trop pauvres pour se payer un secrétaire de rédaction ou de blogs encore plus indigents, bien qu’il soit question de l’héritier du Président de la République.
Un jeune homme prometteur dont nous ne nous risquerons pas à avancer qu’il fera du chemin dans la vie, mais qu’au moins il le tentera en faisant un slalom avec son Piaggio à serrure ADN.
Si beaucoup pensent qu’il est dommage que l’on ne commente pas cette affaire passionnante parmi les occupants estivaux des campings de France et de Navarre, qui s’ils savaient applaudiraient pourtant à l’idée de crucifier un anarchiste, il est une minorité qui considère cela comme une chance : les pédés [1].
Ce peuple fier au poitrail puissant et bronzé derrière une chemise ouverte au troisième bouton s’estime en effet lésé par son absence dans les noms d’oiseaux qui volent entre Val et les détracteurs de Siné.
Jugez plutôt : « juif » , « race » , « islamo-gauchiste » , « staliniste » ... Tout semblait normal et serein, puis surgit le terme « antisémite » , qui jusqu’alors était plutôt considéré comme une qualité typiquement française, au même titre que le baiser ou une poignée de main avec Adolf Hitler.
Quid des pédés ?
Si l’on peut admettre que les valeurs changent et que certains traits de caractère perdent de leur pertinence avec la disparition des préceptes moraux qui définissaient notre grande Nation, il est inconcevable de penser que l’homosexualité est tout d’un coup devenue respectable. En tout cas plus que l’antisémitisme.
Il ne peut s’agir que d’un oubli.
Jean Sarkozy, icône gay malgré lui ?
Les pédés en sont conscients et souhaitent réparer l’erreur avant que les stagiaires officiant l’été dans les rédactions des journaux écrits, parlés ou télévisés ne finissent d’égrener leur chapelet d’enfants lyophilisés, immergés, anaérobisés, pulvérisés ou percés de part en part, et se tournent enfin vers de vrais sujets d’investigation. Comme par exemple la rivalité entre un vieux caricaturiste qui ne fait plus rire personne et le directeur de la rédaction d’un journal que plus personne ne lit.
Du lourd, en somme.
C’est pourquoi ce lobby puissant mais discret, présent aux plus hauts niveaux du monde des arts, de la politique et des media [2], a décidé de bander ses muscles, chose qu’il fait d’assez jolie manière d’ailleurs, et d’entrer à son tour dans la ronde.
D’où le communiqué lapidaire lu hier après-midi par un de ses porte-paroles, Manolo les Gros Rouleaux, ambulancier de son état, Chez Nicole, sympathique estaminet du coin de la rue à Gentilly, 94250 :
« Jean Sarkozy, avec ses cheveux longs, je sais pas s’il est pédé ou juif, mais je me le mettrais bien sur le bout. »
Cette déclaration donne l’occasion à un peuple injustement sous-médiatisé de revenir au premier plan de l’actualité, certes. Mais avant tout, elle permet de préserver la joie d’être bête, méchant, et absolument gratuit.
Dont acte.
[1] Il est à noter que ceux-ci sont paradoxalement bien représentés parmi les occupants des campings de Navarre.
[2] Oui, c’est un seul et même monde, et il est tenu d’une main de fer par les pédés.
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